Parce que ça n’arrive pas qu’aux autres | VIVA MÉDIA Skip to main content

Je me souviendrai toujours du Noël de mes 25 ans. Récemment séparée du père de mes filles, j’étais psychologiquement très fragile et mes coffres étaient complètement vides.

Si le temps des fêtes est généralement synonyme de bonne tablée, de rire et de plaisir, pour plusieurs, il est un douloureux rappel de notre misère. En effet, plus mes filles hachuraient avec enthousiasme les dates sur le calendrier et plus je me sentais complètement démunie. Si mon garde-manger contenait suffisamment de denrées pour nous permettre de tenir jusqu’au mois suivant, je devais me rendre à l’évidence ; notre repas de Noël n’en serait pas un. Cet amalgame de honte, d’impuissance et de tristesse me tenait réveiller la nuit. Je devais trouver une façon de mettre de la magie dans le cœur de mes filles, c’était mon devoir de maman et personne ne le ferait pour moi.  Je ne pouvais pas échouer. Les derniers mois avaient été si difficiles pour elles, pour moi, pour nous. Elles méritaient cette accalmie, cette si précieuse magie.

 

C’est la tête entre les jambes que j’ai téléphoné au responsable de ma paroisse, ce matin-là. Je pleurais, j’avais si honte. Aussitôt, la bénévole qui m’a répondu m’a rassurée en me disant que nous pouvions tous un jour ou l’autre connaitre des difficultés, que je ne devais pas avoir honte. Selon ses dires, je devais plutôt être fière d’avoir fait ce pas pour mes enfants. Ça m’a rassurée, du moins un peu.

 

Je me souviendrai toujours de mes filles qui trépidaient de joie lorsque les bénévoles sont débarqués dans notre salon, les mains chargées de boites de denrées. Une dizaine au total. « Regarde Maman, des biscuits au chocolat! Oh! Maman, regarde! Il y a des cadeaux pour nous », s’est écriée ma cadette tandis que je me confondais en excuses devant les bénévoles tant j’avais honte. Finalement, j’ai explosé en sanglots. « Madame, ne pleurez pas. Grâce à vous, je vais me coucher heureux ce soir parce que je sais que j’ai tendu la main à une famille qui en avait besoin. N’ayez pas honte, un jour, ça ira mieux et vous tendrez la main à votre tour ». Il avait raison, ça va mieux maintenant. Comme toutes les années depuis ce Noël difficile, je tendrai la main, consciente qu’une petite fille sautera de joie en s’écriant « Regarde Maman, des biscuits au chocolat »!

Mélanie Calvé

Journaliste

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