Ils sont 787. C’est le nombre de personnes en situation d’itinérance recensées en Montérégie en 2022. Un chiffre qu’on entend, qu’on note peut-être, mais qui prend tout son sens lorsqu’on comprend ce qu’il représente vraiment.
Lors d’une soirée citoyenne organisée par la Ville de Salaberry-de-Valleyfield, Julie Charbonneau, organisatrice communautaire au CISSS de la Montérégie-Ouest, a pris le temps d’expliquer, calmement, ce que ces données veulent dire. Elle ne parlait pas seulement de statistiques. Elle parlait de parcours de vie, de fragilité, et surtout de résilience.
En 2018, une centaine de personnes en situation d’itinérance sur le territoire ont été dénombrées. Déjà à l’époque, un fait frappant avait émergé : près de 8 personnes sur 10 avaient un passé lié à la DPJ. Petits bouts d’enfance abîmés, adolescences bousculées. Des histoires qui laissent des traces, même une fois devenus adultes.
En 2022, malgré les défis liés à la pandémie et à une météo étonnamment clémente, 120 questionnaires ont été remplis. C’est beaucoup. Et ce qu’on a remarqué, c’est que l’âge moyen des personnes rencontrées a augmenté. On parle maintenant d’adultes dans la quarantaine. Ce ne sont pas seulement des jeunes. Ce sont aussi des gens qui traînent cette réalité depuis longtemps.
Et cette année, en 2025? On n’a pas encore tous les chiffres officiels, mais sur le terrain, une centaine de questionnaires ont de nouveau été remplis. C’est énorme. Même des villes comme Longueuil ne réussissent pas toujours à atteindre ce nombre. Ça montre à quel point les équipes ici sont mobilisées. Et à quel point les gens acceptent de se livrer, parfois, le temps de quelques questions.
Personne n’est obligé de répondre. Derrière chaque case cochée, chaque mot noté, il y a une personne qui a accepté, pour quelques minutes, de raconter un bout de sa vie. Alors oui, les chiffres sont importants. Mais ce sont surtout des histoires humaines, qu’on ne peut pas réduire à des colonnes de données.
Un refuge toujours plein, des besoins qui ne ralentissent pas
Quand on parle d’itinérance, les chiffres prennent vite un visage. Celui d’un homme fatigué qui vient chercher un lit au chaud. Celui d’une femme qui a tout perdu et qui cherche un peu de répit. Celui d’un jeune de 20 ans qui n’a nulle part où aller.
Sur le territoire de Salaberry-de-Valleyfield, le refuge d’urgence porté par la Maison d’hébergement et de dépannage (HDV) est devenu, pour bien des gens, un point d’ancrage. Au cours de la dernière année, 944 personnes y ont été accueillies. Un chiffre qui en dit long. « Le refuge est toujours plein », souffle-t-on. On ne parle pas ici de passages occasionnels. On parle d’un service essentiel, constamment sollicité.
Et ce n’est pas tout. Il y a également une halte permanente pour les personnes en situation d’itinérance. Un endroit pour souffler, se réchauffer, se poser. En un an, 1346 personnes différentes y ont mis les pieds. Parmi elles, 30 % avaient entre 18 et 35 ans. Une statistique qui casse les idées reçues : l’itinérance ne touche pas seulement les plus vieux. Elle commence souvent tôt.
Ces chiffres ne sont pas juste impressionnants. Ils sont inquiétants, parlants, nécessaires à entendre. Ils disent qu’on a encore du chemin à faire. Mais ils disent aussi qu’on n’est pas restés les bras croisés. Des services existent. Des gens s’impliquent. Et dans les gestes du quotidien on devine qu’une communauté se tient debout, pour ne pas laisser tomber les plus fragiles.